Un patrimoine de la mer
De la galère à la pêche
L’arsenal des galères commandé par Louis XIV a profondément marqué les gens de mer à Marseille. Munies de deux voiles latines, les galères fonctionnaient le plus souvent « à la vogue », c’est-à-dire poussées à la rame par des forçats condamnés pour des délits ou pour leur religion. Vers 1700, on comptait plus de 12 000 hommes de chiourme, ou rameurs.
La tartane, bateau de taille variable, créée à Martigues au XVIe siècle, servait tant aux pêcheurs qu‘au transport de marchandises. Elle a longtemps été le « camion de la mer ». Construite avec un peu plus de bois sur l’arrière, la tartane a été convertie en « bateau bœuf » pour pratiquer une pêche traînante, similaire au chalut d’aujourd’hui.
Le « mourre de pouarc », appelé ainsi en raison de sa ressemblance avec le groin du cochon, est très présent sur les anciennes photos. On le retrouve sur tout le littoral provençal et languedocien. Il nécessitait beaucoup de bois à la construction, ce qui le rendait lourd et puissant. Utilisé pour la pêche, il servait aussi à piloter les paquebots pour les manœuvres d’entrée dans le port industriel.
Des barques et des barquettes
Plus populaire, la bette est une petite barque légère à fond plat qui pouvait être facilement tirée à terre. Utilisée par les pêcheurs pour aider les bateaux plus gros, elle est très vite devenue la barque des plaisanciers et des cabanoniers.
Au fil du XIXe siècle, ces bateaux traditionnels ont vu s’amarrer à côté d’eux des paquebots, des goélettes, et autres bateaux de plaisance. Avec l’invention du moteur, les gréements latins ont été remplacés. Les tartanes, démâtées, sont devenues des chalands. Les mourres de pouarc ont continué à travailler à la voile jusque dans les années 1950 au Grau du Roi.
Popularisée à la fin du XIXe siècle, la barquette marseillaise, ou pointu, est l’unique descendante de ces bateaux locaux. Moins chère à la construction et fonctionnant bien à moteur, on les reconnaît à sa proue, à l’avant du bateau, qui se termine par une extrémité d’étrave caractéristique : le « capian ».
La plaisance
À partir du XIXe siècle et plus encore du XXe siècle, l’usage agricole puis industriel des Calanques cède le pas à des usages de loisirs. Grâce au fort ensoleillement et à la présence des vents, la plaisance connaît dans la région un fort développement. La voile habitable, le dériveur, le catamaran, la planche à voile et, plus récemment, le kayak et le paddle ont fait progressivement leur apparition dans ces paysages.
La tradition des régates remonte au XIXe siècle et perdure avec le maintien de plusieurs compétitions. Les sociétés nautiques se sont, dès le début du XXe siècle, fortement impliquées dans la protection de l’environnement et la défense des Calanques.
Ces facteurs expliquent l’importance culturel des pratiques nautiques dans le périmètre du Parc national des Calanques. Ces pratiques sont désormais encadrées pour être rendues conciliables avec la préservation des milieux marins et littoraux.
« L'homme passe sa vie à lancer des amarres,
Puis, quand il est saisi dans le calme du port,
Pour peu qu'à l'horizon une fumée l'appelle,
Il regrette à nouveau la liberté des mers. »Louis Brauquier, poète et navigateur marseillais
La question des vents
Certains gonflent les voiles, d’autres les déchirent. Désirés pour certains et redouté pour d’autres, les vents locaux sont nombreux, et ils portent tous un nom.
Le plus connu et le plus redouté est le mistral, vent de nord-ouest, qui souffle par rafales, « démonte » la mer et complique la navigation. Il amène soleil et ciel bleu immaculé, sauf dans le cas du mistral noir, qui se distingue par un temps couvert et parfois de la pluie. Moins connue, la largado est un vent d’ouest, qui amène le ciel bleu mais s’avère dangereux, car il lève la mer comme le rappelle le dicton « largado d’hiver, diable d’enfer ». Citons aussi lou labé, vent fort de temps couvert provoquant une grosse houle qui passe par-dessus les jetées.
Le sirocco, vent violent du sud, amène quant à lui le sable du Sahara, quand lou levant est un vent d’est qui amène régulièrement la pluie. L’orsuro est un vent violent du nord-est redouté des gens de mer. Il passe par la vallée de l’Huveaune et démonte la mer. Citons enfin la tramontane, vent du nord qui peut amener la pluie, comme l’indique le diction « la tramountano a l’aigo au cuou » : « la tramontane a l’eau au derrière » ! À ces vents s’ajoutent des brises thermiques quotidiennes comme l'eisseroc (sud-est), le vent-larg (sud-ouest) ou encore le gregau (nord-est).
Idées visites
On peut aujourd’hui en apprendre davantage sur certains de ces bateaux en se rendant au musée d’histoire de Marseille ou en plongeant à la recherche des nombreuses épaves qui jalonnent les fonds marins du Parc national…
La barquette marseillaise est bien implantée dans les ports qui parsèment le littoral des Calanques, de l’Escalette à Port-Miou, en passant par les Goudes, Callelongue, Sormiou et Morgiou.