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Les grands personnages

La galerie de portraits des Calanques

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Albert Falco et le commandant Cousteau
De la plongée à la littérature en passant par la randonnée, l’histoire des Calanques est jalonnée de personnalités hors du commun, dont certaines sont mondialement connues. Leurs créations ou leurs actions ont définitivement marqué les esprits. Autant d'invitations à envisager ce territoire sous différents angles...

 

Georges Beuchat

Équiper les plongeurs de Marseille et du monde

Ce fameux plongeur français est né en 1910 en Suisse et mort à Marseille en 1991. En 1934, à 24 ans, il crée la première société de matériel subaquatique, Beuchat International, qui a toujours son siège dans la cité phocéenne. Et c’est dans les Calanques, et notamment à Sormiou, qu’avec Falco et Cousteau, Beuchat réalise les premières plongées en bouteilles de l’histoire.

En 1953, la société invente la première combinaison de plongée, et en 1998 le premier ordinateur de plongée français en partenariat avec la Comex. Les détendeurs conçus par Beuchat feront aussi la fortune de l’entreprise. Aujourd’hui, tout le monde connaît ce nom pour l’avoir vu sur les palmes et les combinaisons de plongée, accompagné de son logo emblématique d’espadon….

 

Henri Cosquer

Découvrir une grotte ornée au cap Morgiou

Né en 1950 à Martigues, Henri Cosquer est un plongeur d’origine bretonne, qui a travaillé pour la navigation et les usines de l’étang de Berre. Ancien directeur du centre de plongée de Cassis, il découvre en 1985, près du cap Morgiou, la grotte ornée à laquelle il donnera son nom. Son entrée est sous-marine et il lui faudra parcourir 175 mètres de galerie pour émerger dans une vaste salle couverte d’œuvres d’art pariétal.

Plusieurs années lui seront nécessaires pour l’explorer et s’assurer de son authenticité. En 1991, il dévoile sa découverte au monde, à bord de son bateau, le Cro-Magnon… Et en 2022, il verra une reproduction de la grotte ouvrir au public, à la Villa Méditerranée à Marseille.

 

Jacques-Yves Cousteau

Explorer le monde du silence

Né en 1910 et mort en 1997, le célèbre commandant Cousteau a exploré les fonds marins et perfectionné le scaphandre autonome, notamment grâce à l’invention, avec Émile Gagnan, du détendeur moderne. C’est dans la calanque de Sormiou qu’en 1942, avec Beuchat et Falco, il réalise les premières plongées en bouteilles de l’histoire.

À Planier, il filmera le fond sous-marin semé d’épaves. En 1952, à Riou, il exhume deux épaves qui dévoilent un trésor antique : environ 2 500 amphores italiennes et 6 000 pièces de céramique ! Cet emplacement et ses alentours sont désormais désignés sous le nom de « triangle Cousteau », et constituent une zone de protection archéologique. En 1977, le commandant au bonnet rouge s’exprimera à la télévision sur la pollution en Méditerranée, et en particulier à Marseille et à la calanque de Cortiou.

 

Henri-Germain Delauze

Mettre la technologie au service de la plongée

Né en 1929 dans le Vaucluse et mort à Marseille en 2012, cet ingénieur et plongeur est célèbre pour avoir fondé en 1962 la Compagnie maritime d’expertises, ou Comex, un des fleurons de l’ingénierie phocéenne sous-marine, leader mondial de la plongée et des travaux en grande profondeur. En 1952, il intègre l’équipe de Cousteau pour la toute première fouille archéologique sous-marine de l’histoire, sur les épaves antiques de Riou. Avec le bathyscaphe Archimède, il rejoint en 1962 le petit groupe des « hommes les plus profonds du monde », avec une plongée à -9 545 mètres.

Il concevra par la suite plusieurs engins d’exploration ultra-sophistiqués, comme le Rémora. Et en 2003, à bord du petit sous-marin Minibex, il retrouve les restes du P-38 Lightning de Saint-Exupéry dans une zone prospectée par le plongeur Luc Vanrell, là où le pêcheur Jean-Claude Bianco avait remonté la gourmette de l’aviateur-écrivain dans ses filets !

 

Alexandre Dumas

Réinventer le château d'If

S’il est né en 1802 en Picardie et mort en Normandie en 1870, Alexandre Dumas le métis aurait pu être marseillais ! Cet amoureux du Midi et de la Méditerranée appréciait la bonne chère et la fête, et sa faconde et son imagination le rapprochent des Provençaux. Il aime Marseille, comme en témoignent ses récits de voyage : il y fait de longs séjours, dans une villa de l’avenue du Prado, fréquentant assidûment le restaurant de la Réserve, situé au Pharo puis au-dessus de la Corniche.

Ainsi son regard tombe-t-il souvent sur le fameux château d’If : cet édifice le titille tant qu’il y placera un des romans les plus fameux de la littérature française. Edmond Dantès, navigateur marseillais, donnera ses lettres de noblesse internationales à la cité phocéenne, et fait désormais partie de son patrimoine au même titre que sa Bonne Mère et ses Calanques. Après Le Comte de Monte-Cristo, Dumas écrira aussi un « roman marseillais » comme il l’appellera, et qu’il intitulera Histoire d’un cabanon et d’un chalet.

 

Albert Falco

Passer sa vie sous la mer

Né en 1927 et mort en 2012 à Marseille, ce fameux plongeur est célèbre pour avoir suivi le commandant Cousteau tout au long de son aventure. Embarqué d’abord comme bénévole dans les recherches archéologiques à Riou, il finira capitaine de la Calypso. En 1942, il est avec Cousteau et Beuchat à Sormiou pour les premières plongées en bouteille de l'histoire. En 1962, il est, avec Claude Wesly, le premier « océanaute » à avoir vécu sous la mer lors de l’expérience sous-marine Précontinent 1 qui se déroule sur l’archipel du Frioul. C’est une première mondiale : deux plongeurs vivent sous l’eau pendant plusieurs jours, dans un « tonneau » immergé, sorte de préfiguration des missions Gombessa.

À sa retraite, il s’engage corps et âme dans la protection des océans et la création des aires marines protégées. C’est sans hésiter qu’il accepte dès 2009 de devenir le parrain du projet du Parc national des Calanques. En juillet 2010, il est sacré Chevalier de la Légion d’Honneur. Il s’éteint trois jours après la création du Parc national. En son hommage, la ZNP de Sormiou porte le nom de celui qui disait : « Les Calanques sont ma vie et le resteront jusqu’à la fin de mes jours ».

 

Jean-Claude Izzo

Écrire des polars marseillais aux Goudes

Né en 1945 et mort en 2000 à Marseille, ce maître du roman policier s’est rendu fameux par la trilogie Fabio Montale, flic déclassé qui vit dans un cabanon aux Goudes. L’auteur fera de Marseille et de ses Calanques un univers singulier, âpre et tendre, à la fois tranchant de lumière et ténébreux jusqu’à la tragédie. C’est lui qui invente, avec quelques autres, le polar marseillais. Ce genre renvoie plutôt à des romans noirs engagés, dont la violence est contrebalancée par la beauté des Calanques, comme dans cet extrait :

 « Passé la Madrague de Montredon, la roche blanche, aride, fait douter d’être encore à Marseille, dans le huitième arrondissement de la seconde ville de France. Alors forcément, parce que l’on est perdu, une halte s’impose devant la table d’orientation de Callelongue qui fait face à l’archipel des îles de Riou. Le pays du Grand Bleu. Le bruit de la ville, son exubérance, prend fin ici. Dans ce paysage qui ressemble aux îles Éoliennes. Le silence tombe sur vous. »

 

La comtesse Lily Pastré

Faire de la vie à Montredon une œuvre d’art

Née en 1871 et morte en 1974, Marie-Louise Double de Saint-Lambert, comtesse Pastré, est un personnage marquant du XXe siècle. Femme audacieuse et d’une exceptionnelle générosité, elle est l’héritière d’une famille d’armateurs et de banquiers, les Pastré, mais surtout de la fortune du vermouth Noilly-Prat. Elle fréquente l’avant-garde artistique de l’entre-deux-guerres, jouant même dans Les Mystères du château de Dé, le film de Man Ray tourné à la Villa Noailles à Hyères.

Esthète et humaniste, elle fait de son domaine de Montredon, aujourd’hui appelé campagne Pastré, une sorte de Villa Médicis, où elle héberge et protége pendant la Seconde Guerre mondiale plusieurs dizaines d’artistes interdits, juifs ou résistants. Elle y reçut également Édith Piaf, Joséphine Baker ou Paul Valéry. Elle créera le festival d’art lyrique d’Aix en Provence et viendra en aide aux compagnons d’Emmaüs, installés désormais à la Pointe Rouge sur des terres qui lui appartenaient.

 

Antoine Pellicé

Initier la randonnée dans les Calanques

Il adhère à la société des Excursionnistes marseillais en 1899 : président de 1911 à 1940, il en est le membre le plus connu. La création et l’aménagement du « sentier du Président », dans le massif de Marseilleveyre, résultent d’un travail acharné. Une équipe d’Excurs tracera l’itinéraire avec Pellicé puis réalisera ce parcours long de 5 km qui évite la route, contourne les vallons et franchit les barres rocheuses. Cette promenade figure parmi les plus connues et les plus prisées des Calanques : elle permet une découverte spectaculaire du littoral sud de Marseille, du mont Rose à Callelongue, côté nature, entre mer et collines.

La plaque du Président visible ici est scellée sur une dalle au col de Brès, point de passage de ce sentier : l’inauguration a eu lieu le 6 avril 1941. Mais l’action de Pellicé ne s’est pas limitée aux Calanques ! Il créa par ailleurs d’autres sentiers dans les massifs provençaux : Sainte-Victoire, Sainte-Baume, Garlaban

 

Dominique Piazza

Inventer la carte postale et randonner dans les Calanques

Célébrité atypique de Marseille, Dominique Piazza est né en 1860 et mort en 1941. On trouvera une plaque commémorative sur son ancien logement au 97 boulevard Longchamp et sa sépulture au cimetière Saint-Pierre. Commerçant aisé et mécène, il initie la construction du théâtre Silvain avec un acteur de la Comédie Française. Et surtout, il crée en 1891 la carte postale photographique, qui donnera à la postérité de nombreuses images de Marseille. Mais quel rapport avec les Calanques ?

Dominique Piazza est très attaché à sa région, et il est un grand amateur de photographie, activité à laquelle il se livre lors de ses nombreuses pérégrinations à travers la cité phocéenne, dans ses collines et sur son littoral. C’est à ce titre qu’il co-fonde en 1897 l’une des premières associations françaises de randonnée : les Excursionnistes marseillais, toujours très active aujourd’hui !

 

Gaston Rébuffat

Grimper et préserver les Calanques

Si les Calanques ont formé des grimpeurs de classe internationale, elles ont aussi engendré des amoureux inconditionnels. Le plus célèbre d’entre eux est Gaston Rébuffat. Né à Marseille en 1921 et mort en 1985, il fut un guide, un écrivain et un conférencier à succès. Dans ses livres et ses films, notamment grâce aux images superbes de son ami d’enfance Gabriel Ollive, il a souligné leur beauté mais aussi leur fragilité. Il a aussi apporté son soutien aux défenseurs du massif, comme Paul Rouaix.

Rébuffat est un humaniste : son œuvre vante la beauté de la montagne, les liens de la cordée, ainsi que la connivence entre l’homme et la nature. Il écrira : « Par une grâce de la nature, cette côte est si accidentée, si inaccessible parfois, sujette aux coups de mer et aux assauts des vents, et, au-delà de la falaise qui domine le large, le relief du massif est si merveilleusement tourmenté, que ce pays privilégié se protège lui-même, est encore un jardin comme il l’était le premier jour ».

 

Antoine de Saint-Exupéry

Survoler les Calanques au péril de sa vie

Il reste à ce jour l’écrivain français le plus traduit et le plus lu dans le monde, avec son récit Le Petit Prince, deuxième ouvrage le plus traduit après la Bible. Un mystère a longtemps entouré sa disparition, dont les circonstances ne sont pas encore complètement élucidées. Plusieurs épaves d’avion ont d’ailleurs été successivement prises pour celle de Saint-Exupéry, dont une située près de Cassis. Cette erreur a donné son nom au sentier de la presqu’île de Port-Miou, dit du Petit Prince.

Rappel des faits : Saint-Ex est mort au large de Marseille le 31 juillet 1944, mais à l'époque on ignore où exactement. En 1998, à Riou, un pêcheur marseillais remonte dans ses filets la gourmette de l’écrivain-aviateur ! En 2000, des morceaux de son appareil sont retrouvés par les plongeurs Luc Vanrell et Henri-Germain Delauze. Qu’est-ce qui conduisait Saint-Ex dans les Calanques ? Il était chargé de faire une série de photos afin de tracer des cartes utiles au tout prochain débarquement en Provence. Mais son avion fut son mausolée

 

Michel Simon

Se reposer du cinéma à La Ciotat

Débutant sa carrière au théâtre, Michel Simon (1895-1975) rencontre un immense succès au cinéma, dans Boudu sauvé des eaux ou Le Quai des brumes. Véritable monstre sacré, il compte parmi les premières vedettes du cinéma et tourne sous la direction des plus grands réalisateurs de l’époque (Jean Renoir, Sacha Guitry, Marcel Carné…). Charlie Chaplin a dit de lui qu’il était « le plus grand acteur du monde ».

Capable de jouer dans tous les registres, du vaudeville à la tragédie, au théâtre comme au cinéma, il s’affirme principalement dans la comédie. Virtuose, il reste l’une des légendes de l’histoire du cinéma français. Tombé amoureux de La Ciotat, ami de la nature et prédisant la 6e extinction des espèces, il acquiert en 1946 la villa qui porte désormais son nom

 

La comtesse Marie de Sormiou

Faire des Calanques un poème

« Ô Terre du Midi dont mon cœur s'éblouit ! Ô Terre où ma tendresse enfin s'épanouit ! » Ainsi écrivait la comtesse Marie, épouse d’Alfred de Ferry, notable et aristocrate marseillais. En échange du titre et de la fortune, Marie amène en dot à son mari la calanque de Sormiou que ses parents lui ont achetée aux enchères. Le couple vit dans la bastide de la Magalone, boulevard Michelet, y menant une vie mondaine et culturelle, recevant Frédéric Mistral ou Anna de Noailles. Mais Marie n’aime rien tant que passer du temps à Sormiou, où elle se rend à cheval pour y pique-niquer, et y écrire des vers chantant les beautés des Calanques…

En 1906, elle publie son premier recueil, Chants de Soleil, qui rencontre le succès. Suivra La Vie triomphante en 1908. Les critiques apprécieront la verve passionnée de cette écriture, que Marie « chante l’eau de la Calanque, les bois d’oliviers, les cigales ou la bastide ». On écrira aussi : « Les Chants de Soleil sont ainsi que de l’air provençal, vibrants de bruits, de rythmes et de grésillements. Un soleil flamboyant fait craquer la terre gorgée d’azur. » Tout un programme !