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Un refuge au cœur des Calanques

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La Cayolle vue du ciel en janvier 2012 © Marseille rénovation urbaine
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Le vallon entre La Cayolle et le col de Sormiou, peint par Joseph Garibaldi en 1907 © collection particulière, dépôt au Musée de Cassis
Les confins marseillais ont souvent servi de zones de relégation pour y implanter usines, prison… et camps de transit puis HLM. Pourtant, au-delà des faubourgs, ce quartier métissé témoigne d’une histoire passionnante, au cœur des bouleversements sociaux et géopolitiques du monde.

 

Entre ville et calanques

Située à égale distance de Mazargues et de la mer, la Cayolle est entourée par des contreforts du massif des Calanques. Séparés de la calanque de Sormiou par le col du même nom, les habitants y ont un rapport à la nature plus terrien que maritime. À proximité se situe la fontaine de Voire, lieu mythique.

Depuis la montagne de l’Aigle et la colline de Lun qui bordent le quartier, on profite de points de vue sur Marseille et le littoral, avec de très belles perspectives depuis les sentiers de crête.

 

Diaspora au milieu des collines

C’est dans ce cadre bucolique, à l’écart du centre-ville, que s’est déroulée une histoire humaine et sociale de premier plan.

Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, cette zone accueille d’abord des réfugiés juifs. Provenant majoritairement d’Europe Centrale et du Maghreb, ils ont survécu aux camps allemands et sont en transit vers Israël. D’autres réfugiés suivent, issus des anciennes colonies françaises d’Extrême Orient et d’Afrique du Nord. Y sont également internés des opposants à l’Empire français : travailleurs vietnamiens indépendantistes, Algériens suspectés d’être membres du FLN, militants politiques en lutte ouverte contre l’administration française…

 

 

Deux architectes au secours des réfugiés

Ces populations sont hébergées dans le camp du Grand Arénas, bâti en urgence sous la direction des architectes Fernand Pouillon (rendu célèbre par la reconstruction de la rive nord du Vieux-Port) et René Egger (qui a conçu le campus universitaire de Luminy). Pour fabriquer des charpentes structurées en arches, ils empilent des bouteilles de terre cuite ! C’est là le seul matériau de construction disponible à la fin de la guerre, les Allemands ayant tout utilisé pour élever leur ligne de défense (le fameux Südwall).

Ces 80 baraquements en forme de demi-tonneaux abriteront dans des conditions précaires, pendant environ vingt ans, plus de 400 000 Juifs, soit presque un Israélien sur dix ! Subventionné par l’American Jewish Joint Committee, le camp du Grand Arénas sera visité en 1955 par Eleanor Roosevelt, épouse du président des États-Unis.

Dans les années 65 à 80, le camp est progressivement rasé. Complètement disparus aujourd’hui, on peut encore voir certains de ces baraquements au musée d’art contemporain d’Herzliya en Israël.

 

Cités provisoires et « Marche des Beurs »

Après le départ des Juifs, ces abris accueillent des mal-logés, des immigrés et des gitans, sur une zone qui se couvre progressivement de bidonvilles et de campements. L’État décide la construction de cités provisoires, qui année après année se dégradent jusqu’à devenir des taudis.

Parmi ces cités provisoires, il y a la cité du Baou, d’où part, le 15 octobre 1983, la Marche pour l’égalité et contre le racisme, ou « Marche des Beurs » comme l’appellent les médias : c’est la première marche nationale antiraciste de France. Elle se termine à Paris le 3 décembre de la même année, par un défilé de plus de 100 000 personnes, et par une rencontre avec François Mitterrand. Le président promet alors une carte de séjour et de travail valable pour dix ans, une loi contre les crimes racistes et un projet sur le vote des étrangers aux élections locales.

 

Entre nature et précarité

À cette époque, la Cayolle est un espace protéiforme et inachevé, où se côtoient populations venues des quatre coins du globe et maraîchers, présents depuis plus d’un siècle grâce au canal de Marseille et aujourd’hui disparus avec l’urbanisation presque totale du quartier.

Ici s’invente alors, malgré la dureté des conditions de vie, une manière particulière d’être au monde : une sociabilité de village, une existence en plein air, au pied de la colline et au bout du monde.

 

 

De la ZAC à l’éco-quartier

Dans les années 80, il est fait table rase du quartier : les derniers baraquements Pouillon, les cités provisoires et les bidonvilles sont détruits, des routes sont construites, les terres cultivées sont urbanisées. La Comex s’installe, ainsi qu’un centre commercial, des pavillons et des cités HLM. Dans les années 2010 est lancé un projet de rénovation urbaine et la construction de nouveaux bâtiments résidentiels et d’équipements. Aujourd’hui, presque rien ne permet de soupçonner les événements majeurs qui se sont déroulés là.

Mais la Cayolle continue d’être un site vivant qui se distingue par un très intéressant brassage de populations, héritage d’une histoire riche et complexe. Le Parc national des Calanques y travaille activement sur la médiation et participe à l’importante activité associative de proximité du quartier.

 

Valoriser les Hauts de Mazargues

Le déménagement du Théâtre du Centaure, qui a quitté la campagne Pastré pour les Hauts de Mazargues, a permis l’implantation d’un nouveau lieu culturel à la Jarre, au nord de la Cayolle. Une compagnie de théâtre équestre y travaille, organise de nombreux événements sur des thématiques écologiques, philosophiques et artistiques, et y accueille les enfants et jeunes du quartier pour tisser du lien social autour du cheval.

Mitoyen de ce lieu, un parc paysager de deux hectares a également vu le jour, le parc de la Jarre. Au sein de ce parc bordé par le canal de Marseille poussent plantes aromatiques, vignes et arbres fruitiers. Avec sa bastide et sa serre à façade néo-gothique, l’ensemble forme un site à fort caractère patrimonial. Autre point d’intérêt à proximité, l’agachon de la Soude présente un bel exemple de rocaille.

Un réseau de voies cyclables et piétonnières, dont l’allée des Calanques, est en cours d’aménagement. Il permettra à terme d’unifier les Hauts de Mazargues et de relier entre eux les quartiers de la Cayolle, de la Jarre et de la Soude. Plus largement, il raccordera les plages du Prado au cœur du Parc national via le parc Borély. Un cheminement sera ainsi créé entre le jardin Bortoli, le parc de la Jarre, la maison de quartier de la Cayolle, ainsi que le futur parc du Baou de Sormiou, imaginé par le Parc national, la population locale et les enfants des écoles.

 

Visite et réglementation

Si le quartier de la Cayolle est situé en aire d’adhésion, les espaces naturels qui l’entourent sont classés en cœur de Parc national. On peut les découvrir toute l’année, sauf en cas de fermeture des massifs pour cause de risque d’incendie.

Avant toute sortie au Parc national des Calanques, préparez votre visite et consultez les bons gestes à adopter et les réglementations à respecter.

 

Accès

Bus RTM n°23 - direction Beauvallon, arrêt La Cayolle.

 

 

Localisation

Coordonnées GPS : 43.228999, 5.401868

En son et en vidéo

Plusieurs vues de l’ancien camp de la Cayolle et des collines alentour sont visibles dans ces images d’archives de l’INA :

Visite de Madame Eleanor Roosevelt au camp de transit du Grand Arénas (1955)

Une terre qui leur est promise (1962)

L'arrivée de la Marche pour l'égalité et contre le racisme à Paris (1983)


Source URL: https://calanques-parcnational.fr/la-cayolle-marseille